Résumé
L’opinion publique et une grande partie de la littérature spécialisée sont plutôt sceptiques quant aux chances de succès de la lutte contre le dopage dans le sport de compétition. Ce jugement pessimiste est justifié par l’évolution de la plupart des disciplines sportives de haut niveau. Quelques sports extrêmes font toutefois exception dont les limitations librement consenties en matière de moyens autorisés vont bien au-delà des dispositions légales minimales. L’alpinisme, où même l’oxygène en bouteille est considéré comme un produit dopant, en fait partie. Cet article a pour but d’expliquer ce statut exceptionnel de l’alpinisme à partir d’une comparaison avec une discipline sportive réputée particulièrement touchée par le doping: le cyclisme sur route. La thèse défendue est que la régulation plus stricte de la pratique de l’alpinisme résulte du maintien d’une marge de liberté permettant des innovations normatives. Les performances sportives peuvent être augmentées non seulement par un relâchement des normes; mais elles peuvent aussi, inversement, être mises en évidences par le biais de normes plus strictes. Chaque discipline est potentiellement en mesure de se réguler elle-même. La plupart du temps, cependant, cette possibilité reste inexploitée faute de marge d’innovation normative suffisante. L’interdiction du doping a, à ce titre, des conséquences fatales.